Le niveau des élèves de CM2 en orthographe continue de baisser: (voir ici :note d’information du Ministère – décembre 22)
L’an dernier, 7 000 élèves ont fait une dictée, « sans difficultés particulières », assure le ministère. Et en moyenne, sur un peu moins de 70 mots, ils ont fait vingt fautes. À la fin des années 1980, en 1987, leurs parents en faisaient deux fois moins sur la même dictée.
Ainsi, parmi les principales difficultés constatées, c’est l’orthographe grammaticale (règles d’accord entre le sujet et le verbe, accords dans le groupe nominal, accords du participe passé) qui concentre l’essentiel des difficultés. Moins d’un élève sur deux écrit bien le mot « demandaient » dans la phrase : « Papa et maman se demandaient ». Autre erreur notable : les CM2 d’aujourd’hui butent particulièrement sur les adverbes. Enfin, l’accord de l’adjectif « inquiets » de la dictée passe de 46,2% de réussite en 1987 à 25,3% en 2021.
Plus d’un quart des CM2 d’aujourd’hui ont fait plus de 25 erreurs sur la dictée soit quatre fois plus qu’à la fin des années 1980. Cette baisse des résultats concerne l’ensemble des élèves, quels que soient leur sexe et leur âge, même si les filles restent plus performantes. Là où les garçons totalisent quelque 21 erreurs, elles en font 17. Le poids de l’origine et de l’environnement social reste également notable : les élèves d’écoles les moins favorisées font en moyenne 22 erreurs contre 15,5 observées dans les écoles accueillant les élèves les plus favorisés. (source FranceInfo)
Le plan orthographe de l’école élémentaire du Ministre (janvier 23):
Après la mise en place d’une heure par semaine de soutien en français aux élèves de 6e en difficulté à partir de la rentrée prochaine, le plan du Ministre demande:
- Tous les jours, une dictée courte, exercice « essentiel », qui doit permettre de « comprendre et de bien respecter les règles de grammaire et d’orthographe » vues parfois plusieurs semaines plus tôt.
- écrire et de lire au moins deux heures par jour.
- lire au moins « deux textes longs », d’au moins 1 000 mots chacun, toutes les semaines.
Les mécanismes impliqués dans l’apprentissage de l’orthographe (Marie-Line Bosse, professeure de psychologie cognitive, interview Télérama 10/01/2023 – points essentiels):
L’évolution des résultats n’est pas liée à des problèmes cognitifs. Le temps consacré à l’apprentissage de l’orthographe s’est beaucoup réduit depuis les années 1980.
Les bons lecteurs ont plus de chance d’être de bons « orthographeurs ». En effet, une grande part des connaissances en orthographe s’acquiert par la lecture : c’est à force de rencontrer des mots dans les livres que nous les mémorisons. Les élèves qui ont des faiblesses en lecture font souvent beaucoup de fautes. Et ça fait boule de neige : ils n’aiment pas lire, s’adonnent rarement à cette activité, rencontrent moins de mots et savent donc moins bien les écrire. Mais on peut aussi dévorer les livres et être mauvais en orthographe, même si c’est moins fréquent ! Certains lecteurs très motivés par le sens parcourent les mots à toute vitesse, en devinent la moitié, pour arriver plus rapidement au dénouement de l’histoire. Si ces personnes ont des faiblesses en orthographe, c’est peut-être à cause de cette lecture trop rapide.
Des études montrent que la répartition de l’attention visuelle pendant la lecture joue un grand rôle dans la maîtrise de l’orthographe : ceux qui traitent toutes les lettres en même temps, de manière exhaustive, mémorisent mieux les mots que ceux qui se concentrent seulement sur le début ou la fin du mot, par exemple.
La recherche actuelle fait aussi l’hypothèse que les élèves les plus forts en orthographe sont probablement ceux qui sont les plus sensibles aux fréquences d’associations de lettres. Ils savent implicitement qu’un mot français ne commence jamais par une double consonne ou ne contient quasiment jamais la suite de lettres « gz ». À l’inverse, un enfant dysorthographique va écrire examen « egzamin » sans voir où est le problème. Cette conscience des régularités de la langue tient au fonctionnement de notre cerveau, qui apprend de façon très statistique. Cependant, des différences existent aussi entre les individus à ce niveau-là.
Comment aider les enfants qui n’ont pas de facilités en orthographe ?
Importance de la motivation. On peut rendre les règles orthographiques plus rigolotes, imaginer des défis à relever plutôt que des dictées-sanctions à la fin de la semaine. On peut aussi les enseigner de manière plus explicite, ne pas laisser les enfants les deviner tout seuls. Chez les enfants dyslexiques, le travail sur les familles de mots est très efficace.
Savoir écrire sans faire de fautes n’est pas un signe d’intelligence.
Illustration: https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Mus%C3%A9e_%C3%A9cole_du_Monastier-sur-Gazeille_la_dict%C3%A9e,.jpg
Pour aller plus loin:
Café pédagogique: Jean-Pierre Jaffré: Pour une vraie pédagogie de l’orthographe.
La faute de l’orthographe – Arnaud Hoedt, Jérôme Piron – TEDxRennes – 21 juin 2019 –
The Conversation: Orthographe pourquoi le niveau baisse-t-il?
The Conversation: Dictée guidée: un nouveau moyen de progresser en orthographe? (mis à jour 09/01/23)